De la collecte des preuves issues de sources ouvertes à leur présentation dans les tribunaux, des défis persistent. Cependant, plusieurs outils et initiatives émergent pour faciliter et valoriser l’intégration de l’OSINT dans le cadre judiciaire.

L’OSINT ne sert pas uniquement à identifier des acteurs malveillants. Dans certains cas, les informations collectées en ligne ont mené à l’arrestation et à l’inculpation de criminels. Par exemple, les vidéos montrant les exécutions extra-judiciaires commises par le militaire libyen Mahmoud al-Werfalli ont permis à la Cour internationale de justice de porter son premier mandat d’arrêt contre l’individu. Plus récemment, ce sont les images diffusées par les émeutiers du Capitole, aux États-Unis, qui ont permis au FBI de les identifier et de les interpeller.

L’abondance de contenu incriminant en ligne n’est pas un gage de justice en soi. La recevabilité de la preuve dépend, d’une part, de la minutie et de la rigueur des OSINTers mais aussi des autorités. Ces dernières doivent avoir les connaissances nécessaires pour intégrer les preuves numériques au sein du processus légal.

Des initiatives pour aider les tribunaux

Alors qu’il n’existe actuellement pas de normes internationales communes pour la collecte, la conservation ou la présentation des preuves issues de sources ouvertes dans les tribunaux internationaux et nationaux, quelques initiatives visant à combler le fossé entre le travail des OSINTers et des autorités judiciaires ont vu le jour ces dernières années. Parmi elles, on retrouve celle du collectif Bellingcat s’étant associé au Global Legal Action Network pour créer le Justice and Accountability Unit. L’objectif du projet ? Démontrer la viabilité de l’information de source ouverte dans les processus judiciaires, en réalisant notamment des procès fictifs, permettant à des acteurs du procès criminel de mieux comprendre la valeur de l’OSINT en justice.

L’Association internationale du barreau a lancé, pour sa part, l’application eyeWitness to Atrocities, une intiative « combinant la technologie et le droit ». Elle permet aux OSINTers de récolter et de préserver adéquatement des preuves issues de sources ouvertes à des fins de poursuites criminelles.

Des outils pour aider les OSINTers

Similairement à eyeWitness to Atrocities, l’analyste canadienne Ritu Gill a lancé, en novembre 2023, son application Forensic OSINT. Forte de près de deux décennies d’expérience en OSINT, l’analyste spécialisée en renseignement issu des réseaux sociaux (SOCMINT) insiste sur la polyvalence de son outil, le distinguant de ses concurrents sur le marché.

« C’est une extension de navigateur qui agit comme un outil de capture de contenu, mais pas seulement », explique l’analyste. Les utilisateurs peuvent aussi, en quelques clics, obtenir des conseils pratiques et des informations générales pour enquêter sur les plus grandes plateformes de réseaux sociaux, comme TikTok, YouTube, X (anciennement Twitter) ou Reddit. En ouvrant l’application sur un site de réseau social, celle-ci révèle les différents types de contenus à scruter pour faire la lumière sur des connexions sociales entre des utilisateurs, ou encore pour retrouver la date exacte de la publication d’une image sur la plateforme.

Forensic OSINT est destiné à tous ceux dont l’analyse des contenus de réseaux sociaux et de pages web fait partie de leur quotidien : les policiers, les enquêteurs privés, les journalistes etc. L’application se démarque par sa facilité d’utilisation, selon Ritu Gill. « Beaucoup d’analystes OSINT ne sont pas des technologues; la plupart n’ont pas d’expérience en technologies de l’information, ni en informatique », rappelle l’analyste. « Il était important pour moi de créer une application conviviale, avec une interface compréhensible, pour ne pas se compliquer la tâche », poursuit-elle.

Pour prouver que le contenu numérique n’a pas été manipulé entre sa première publication et sa présentation en cour de justice, l’application Forensic OSINT « hache » les données des contenus récoltés sur le Web. Le hashing fonctionne ainsi comme une sorte de sceau d’authenticité, permettant à la preuve numérique d’être recevable en cour.

Pour Ritu Gill, la multiplication des outils et des technologies de validation de preuves OSINT renforcera sans doute les normes des tribunaux, auxquelles devront se soumettre les OSINTers. Une rigueur sans cesse renforcée, qu’elle accueille avec enthousiasme: « Si un élément de preuve doit être soumis à un tribunal, on veut s’assurer qu’il est authentifié, vérifié et validé. C’est la seule façon de faire. »

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